Dilution dans le désert

Appeler à soi le caprice,
fermer la chambre à Imouzer,
partir tôt avec le soleil à gauche,
marcher vers les gorges rouges sans se retourner sur le Kandar,
laisser là tous les rêves,
ceux d’Imouzer qui décrivent tout,
et puis ceux d’avant qui décrivaient Imouzer.

Marcher vers le Sud et ne s’arrêter que par la sensation du désert.

Que transmettre lorsque l’on est soi-même chaotique ?
Que décrire, sinon le chaos lui-même ?
Mais décrire fige et glace et le chaos disparaît sous le verbe irréel.

Pourquoi se traîner jusqu’ici ?
Dans ce désert particulier qui étale ses cailloux noirs comme d’autres aspergent la planète de grains de sable.
Toute cette platitude _ cette formidable et salvatrice absence de poésie _ les jours sont chauds _ les nuits sont glacées.

Vous versez une goutte de parfum dans un litre d’eau _ vous prenez une goutte de ce litre et la versez dans un autre litre _ vous répétez l’opération 10.000 fois,
si vous êtes fier de faire partie d’Homo-Sapiens vous continuez l’opération 10.000 fois de plus …
ensuite vous venez dans ce désert _ vous regardez le cosmos par cette nuit étoilée comme toutes les autres nuits dans ce désert,
et vous comparez distraitement les traces de parfum dans la dernière bouteille avec les possibilités d’existence de la pensée dans l’univers.

Beaucoup de scientifiques ne croient pas en l’homéopathie.
Doit-on croire à la pensée dans l’univers ?
Devant tant de cailloux noirs, peut-on croire à la pensée ?
Notre volonté _ notre pouvoir d’analyse _ nos décisions,
nos choix _ nos affinités _ nos visions…
Nous empilons les interprétations dans un équilibre instable.

Si au moins cela était la dilution de quelque chose qui a été immense chez nos lointains ancêtres,
comme une immense fatigue,
mais c’est tout le contraire,
nous déléguons la pensée à nos civilisations
et seule nous est restée la peur de la réalité,
la réalité qui nous hurle que dans le temps et l’espace,
la pensée n’existe pas.

Est de Merzouga

Est de Merzouga

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1 réponse à Dilution dans le désert

  1. lutin dit :

    Cette photo est magnifique digne d’une peinture

    « Mais décrire fige et glace et le chaos disparaît sous le verbe irréel »

    oui les mots sont inférieurs à la pensée

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