Je ne vous dis que ça : il y a foule ce soir chez Kader.
Son nouveau grand écran ultra plat s’allume alors que le ciel rosit de plaisir et de fatigue : le roi va parler, le soir tombe enfin.
Moi j’ai peur.
J’ai peur de ce qui change ce que j’aime, tout en souhaitant que pour tous, cela aille mieux.
Alors, pendant qu’il parle, on entend les mouches voler, il est rigide dans son costume et les berbères qui l’écoutent sont comme de l’acier.
Debout devant la fenêtre, le Kandar me fait signe et me calme, me rappelle les légions et les animaux _ me rappelle l’énormité du temps qui engloutira ce discours.
Subtile ici la différence entre Parlementaire et Constitutionnel.
On se méfie tranquillement du Roi, on se méfie souvent d’avantage des parlementaires,
et les ministres !
Par quoi commencer ?
Difficile cette histoire de la poule et de l’oeuf,
difficile cette histoire inventée par les grecs, la démocratie.
Moi j’ai peur,
peur d’être déçu,
peur que ces silencieux espèrent trop _ espèrent pour eux.
Le Kandar, lui, est désespéré par mon attitude,
il a disparu _ mes yeux le cherchent mais mes oreilles fouinent en quête du moindre murmure dans la salle.
Non, rien.
Le discours est écouté,
comme le vent léger,
comme les grues qui passent et vont ailleurs.
Ils se lèvent, ils vont réfléchir à tout ça,
demandent à leurs voisins si leur famille va bien,
acceptent une aide pour leurs champs…
A demain …
Un écran plat n’est qu’une forme de mode, nous sommes à la page, à la pointe du progrès, mais l’important c’est ce qui se passe dedans, ce que l’on dit dedans, et malheureusement ce n’est pas à la pointe du progrès, j’y vois plutôt une marche arrière.
OK … mais là, ce qui se dit peut peut-être éviter un bain de sang.
Et ça, cette démarche, c’est à la pointe du progrès.
Dans cette histoire, dans le Kandar, ils ne croient qu’à ça et surtout pas à plus.