Un an à Imouzer du Kandar – Histoire 14

Je n’espère même pas dormir,
alors je pense à ma bibliothèque restée là-bas.
Et cette absence me fait prendre conscience
que lire l’inconnu m’ennuie.

Sur ces lointains rayonnages sont placés côte à côte
des pensées dissonantes dont pour beaucoup
je n’ai plus aucun souvenir.
Certains écrivains, eux – et il suffit de compter les livres –
ont rempli les rayonnages et m’attendent là-bas;
avec amour et jubilation je me suis régalé de ce que je connaissais déjà.

Parfois on aimerait aimer l’inconnu – mais c’est un leurre –
tous les rendez-vous étaient déjà pris.
Pour les autres, les mouchoirs de l’adieu précoce étaient agités depuis toujours.

Tout ceci me rassure et peut-être m’apportera le sommeil.

Debout devant la fenêtre ouverte, j’attends l’apparition du massif du Kandar
qui m’a appris que tout est occulte
car la vie passe en nous et coure comme une rivière,
sur les sables – dans la boue – entre les rocailles.

L’aube ruisselante surprend mon regard
comme la vision d’un jardin magnifique en sautant devant un haut mur
ou en regardant par une étroite serrure.
Cette vision me libère et me fait poser la dernière question de cette nuit :
tout point de vue est-il identique à ce regard incertain que je pose, là, sur cette campagne ?

Moulay Idriss (Maroc)

Moulay Idriss (Maroc)

Ce contenu a été publié dans Imouzer du Kandar, avec comme mot(s)-clé(s) . Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *